Il a fallu attendre que tu sois d'accord pour t'installer dans mon ventre, après 3 fausses couches. J'aurais dû comprendre dés ce moment-là qu'être mère signifie ralentir mon rythme, pour suivre le tien. Travailler mon impatience.
Puis, il y a eu l'accouchement. Le dernier mois, si long, si inconfortable, à attendre que tu sortes de "là".
La césarienne. La montée de lait qui a tardé à arriver. L'équipe médicale qui me presse, qui te presse, qui nous bouscule. "Ah? Il faut donc que ce soit bébé qui s'habitue à mon rythme de vie? ok." (en fait, non, pas ok... je l'ai très rapidement compris !!).
Ensuite, les premiers mois.Mon inexpérience m'a été très avantageuse : je ne savais pas "quand Bébé est-il sensé se retourner sur le coté / tenir assis / marcher à quatre pattes"... et je me refusais de me renseigner sur le sujet, car je savais qu'étant impatiente par nature, j'aurais eu des attentes vis-à-vis de toi, et cela aurait nuit à notre belle relation.
Je ne t'ai pas calé dans des coussins pour que tu t'assois. Je ne t'ai pas non plus aidé à te déplacer en te tenant par les mains. Au début, par ignorance, puis, par conviction (cf cet article sur la motricité libre).
Pour l'alimentation, là aussi, cela a été tout un travail sur moi qui a été nécessaire pour te permettre d'aller à ton rythme (cf cet article), et de ne pas écouter les pédiatres, tantes et voisins. Tu as d'ailleurs accepté de manger réellement uniquement à tes 10 mois.
Toi qui refusais de faire mes nuits (tu ne les as faites qu'à tes 3 ans environ...), tu as permis à ma patience de se développer à tes cotés.
Pas de récompense, de "tableau de motivation", de félicitations, de chantage, de punition. Juste respecté le rythme que tu as, avec ses accélérations et ses ralentissements.
J'essaye au maximum de ne pas faire toute une histoire de tes progrès ou de tes faiblesses ; parfois, je te fais remarquer tes réussites, sans trop en faire tout un plat. J'essaye d'éviter les félicitations, en les remplaçant par des mercis, ou en exprimant ce que je vois (vive les atelier Faber et Mazlish !) : par exemple, au lieu de dire "ouahhhh, t'es le plus fort", je développe : "ouahhhh, je vois que tu t'es savonné tout seul, avec beaucoup d'application ! Et tu as même fait entre les orteils ! C'est ce que j'appelle prendre soin de soi !".
A table, nous n'avons pas parlé des faibles quantités que tu ingérais, mais plutôt de nos journées, ou du goût des aliments.
Le matin, au lieu de ronchonner de mes nuits écourtées, je te demandais plutôt "alors, bien dormi?" (... en pensant, intérieurement : "PARCE QUE MOI, NON !!!").Bien sûr, il y a des dérapages, qui ont fait partie de mon apprentissage en tant que maman. Il m'est souvent arrivé de trop insister.
Je me rend compte d'ailleurs que ces dérapages étaient souvent liés à ma fatigue : moins d'énergie, moins de patience.
Mais tu m'as rapidement fait comprendre (grâce à ta... "force de caractère", disons) que cela n'était pas productif. "Ah oui, c'est vrai, désolée Ptiloup !".
Tata Fernande, la voisine, la maman-géniale-de-facebook... toute la société semble vouloir que nos enfants sachent faire avant l'heure. Je trouve qu'il est plus facile de lutter contre un enfant que contre la société toute entière !
De nos jours, il faut une sacrée énergie pour ne pas suivre le courant, pour faire confiance à son enfant et le laisser faire à son rythme.
Aujourd'hui, te voilà continent, la journée, la sieste, et - lorsque à ces moments, tu souhaites ne pas avoir de couche - la nuit.
Au début, c'est évident que j'ai été très tentée de te "forcer" / t'encourager à aller sur le pot. Quelle mère ne l'a jamais été? Mais j'ai bien vu, pendant ces trois années passées à coté de toi, que tu presser sert plus à te braquer, et/ou à mettre de la mauvaise ambiance à la maison.
Alors je me force à lâcher prise.
J'ai juste attendu que ce soit le bon moment pour toi : que tu me dises que tu souhaites faire pipi dans le pot, tout simplement.
... un tableau pour se motiver à être continent? Pas chez nous, merci.
Tu n'es pas un génie.Tu ne fais pas encore de "bonhomme têtard", alors que les livres disent que tu es sensé savoir les faire.
Tu parles mieux que beaucoup d'autres enfants de ton âge, mais moins bien que certains.
Tu m'impressionne très souvent sur des sujets inattendus : tu refuses parfois de manger de la viande car tu sais que cela fait mal aux animaux, tu essayes de consoler toutes les personnes tristes que tu croises dans ta vie, tu mimes nos gestes du quotidien (depuis quelques semaines, tu me fais des petits massages, comme parfois le fait ton papa)...
Tu es généreux, timide avec les gens que tu ne connais pas bien, apeuré pour des choses qui me paraissent insignifiantes, drôle et attentionné...
Tous ces défauts, qualités et capacités changeront certainement un jour ou l'autre.
En attendant, mon rôle est d'essayer de t'accompagner avec gentillesse, et avec le moins de jugement possible, vers le chemin que tu souhaites emprunter, en respectant ton rythme, tes forces et tes faiblesses.
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